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3 septembre 2015 4 03 /09 /septembre /2015 09:46
La maîtresse au piquet de Jean Anglade

Frédérique est une jeune institutrice qui a vécu des moments difficiles avec une belle-mère acariâtre et le décès prématuré de son père. Elle est fatiguée de la vie parisienne et de la difficulté d’enseigner en banlieue. Elle trouve un certain réconfort chez un libraire érudit, Pierre Méraville. Avec lui, elle connaitra le monde de l’édition et de la critique littéraire. Malheureusement, Méraville décède brutalement. Aussi elle décide de se faire muter en Auvergne. Là, elle va découvrir un autre monde… Celui des choses simples et de la campagne laborieuse peuplée de paysans droits dans leurs sabots de peupliers et dans leurs convictions.

Installée dans une petite maison d’Antaillat, elle va transformer son lieu de vie en repaire pour les poissons rouges, les chats et les escargots et la nommer ma Cyprinière en hommage à ces mêmes poissons rouges élevés avec beaucoup d’attention dans le petit bassin créé à cet effet. La compagnie de son chien Croc-Blanc, ainsi nommé en souvenir du roman de Jack London, la réconforte dans ses moments de solitude et l’accompagne dans ses promenades dans la campagne.

Les voisins sont charmants (même si les Kleister sont mal acceptés pour d’obscures raisons liées à la dernière guerre), les élèves studieux, bien courageux et conquis par cette jeune institutrice qui charme son auditoire avec sa clarinette joyeuse !

Puis arrive Vincent, ouvrier modeste mais si charmeur… Une idylle va naitre entre eux, et Frédérique va redoubler d’efforts pour accompagner son nouvel ami vers les joies de la connaissance et de la lecture…

Jean Anglade ne déroge pas aux règles qu’il semble se fixer pour chaque roman : mettre en scène des personnages attachants et les faire évoluer dans sa chère Auvergne en n’omettant surtout pas de parler avec nostalgie d’école, cette école qu’il a aimé instituteur, celle de la classe unique, de la morale et de la plume sergent-major, de l’ascenseur social et du coup de règle sur les doigts…

Comme d’habitude, c’est bien écrit. Je dirais même avec application. Il n’oublie rien. Les petits détails qui font une ambiance, les bons sentiments qui vont jusqu’à la grandeur d’âme… Lire un roman d’Anglade, c’est glisser dans une époque révolue et dans un grand bain de plaisir qui confine au bonheur. Certains penseront certainement qu’Anglade est un peu mièvre et démodé. Ils n’ont pas entièrement tort. Pourtant, peu d’écrivains savent, comme lui, émouvoir leurs lecteurs. Personnellement, je l’en remercie !

Michelangelo 2015

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27 juillet 2015 1 27 /07 /juillet /2015 09:02
La soupe à la fourchette de Jean Anglade

Zénaïde est une petite marseillaise placée dans une ferme du cantal par sa famille pendant la seconde guerre mondiale. La pénurie de vivres est telle en ville que cette échappatoire est encouragée par les autorités.

Zénaïde se trouve confrontée à un choc culturel et c’est l’occasion pour l’auteur de magnifier cette vie rurale auvergnate qui lui est chère… On y apprend maintes traditions locales, autant sociales que culinaires. Ainsi, la soupe à la fourchette n’est autre qu’une recette typique du Cantal. Zénaïde va apprendre la vie de la ferme, s’habituer aux goûts délicieux des produits locaux (fromages, saucissons, viandes, plats cuisinés). Elle va garder les vaches et découvrir ce qui ressemble fort à une première relation amoureuse avec Adrien, de deux ans son aîné. Adrien va devenir rapidement celui qui va l’initier aux mystères de la vie dans la campagne cantalienne mais aussi son protecteur dans l’univers forcément un peu fermé de ce village replié sur lui-même, loin de la fureur de la guerre.

Jean Anglade est un excellent conteur au style alerte quoique parfois un peu empesé et il nous entraîne sur les chemins qu’il magnifie, sa belle Auvergne. Tel un historien attentif à préserver une culture en voie de disparition, il s’applique à faire vivre devant le lecteur des pratiques ancestrales et n’hésite pas à mêler le patois au français dans ses dialogues forts imagés. C’est certainement ce qui plait chez cet écrivain qui réveille en nous une forme de nostalgie pour un passé perdu ou en passe de l’être.

Malheureusement, il m’a semblé que ce travail d’ethnologie l’emportait sur la trame romanesque qui passe au second plan pour n’être qu’un prétexte à la reconstitution « historique ». J’en veux pour preuve une seconde partie traitée en accéléré pour aboutir à une fin boiteuse qui laissera le lecteur sur sa faim et dont le seul objectif est de terminer l’exposé.

J’ai l’occasion de côtoyer régulièrement un natif de l’Auvergne, Michel, qui est lui aussi amoureux de sa région et j’ai eu récemment l’occasion de faire un petit séjour cycliste dans une partie reculée du Cantal qui m’a ravi. Les propos de Jean Anglade confortent chez moi l’idée que l’Auvergne est une magnifique région un peu délaissée avec une richesse culturelle indéniable.

Jean Anglade est l’heureux porteur de voix de son beau pays et se trouve malheureusement affublé du titre un peu péjoratif dans l’édition parisienne d’écrivain du terroir. Mais n’est pas écrivain du terroir qui veut ! Jean Anglade, lui, est un grand, taillé à l’image des volcans de son Auvergne natale.

Michelangelo 2015

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19 mai 2015 2 19 /05 /mai /2015 11:33
Temps glaciaires de Fred Vargas

Nous retrouvons avec plaisir l’inspecteur Adamsberg qui va tenter de démêler l’étrange relation qui existe entre un drame vieux de dix ans qui a abouti à la mort de deux personnes en Islande, et l’acharnement réel ou supposé d’un tueur à faire disparaitre certains des adeptes d’une étrange association qui fait revivre des grands moments de la vie publique de Robespierre et de cette période historique qu’on désigne sous le nom évocateur de Terreur.

Adamsberg ayant des façons de pratiquer ses investigations de manière très personnelle, et ses adjoints se montrant également originaux comme à leur habitude, l’intrigue promet d’être passionnante ou pour le moins divertissante. C’est du moins l’état d’esprit qui était le mien en abordant cette lecture.

Or, même si l’intervention d’un sanglier protecteur ou l’esprit dévastateur islandais au joli et terrifiant nom d’Afturganga pimentent cette lecture, même si le cadre de l’enquête est parfaitement soigné comme d’habitude et les personnages bien campés, j’ai le regret de constater que je me suis un peu ennuyé lors de cette lecture.

Plutôt inconditionnel des romans de Fred Vargas, cela m’a étonné. Aussi il m’a fallu un certain temps avant de poser cet avis sur le papier. Juste le temps de comprendre cet ennui que j’ai enfin circonstancié.

Fred Vargas écrit bien, parfaitement bien. Elle sait créer des situations originales et nous proposer des enquêtes conduites avec brio. Ce n’est donc pas cela qui est en cause ici. En réalité, ce que j’ai ressenti, c’est une forme d’usure, une fatigue devant les invraisemblances proposées, comme ce sanglier qui ressemble un peu au cerf de son roman ‘Dans les bois éternels’, ou ces petits os humains dénichés dans un endroit hautement improbable... Longtemps j’ai adhéré à ces divagations qui donnaient un certain relief à l’intrigue (voir ma critique dithyrambique des bois éternels’), autant maintenant elles me lassent… C’est un ressenti très personnel, j’en conviens, et je ne souhaite pas décourager les futurs lecteurs de ce dernier roman. Pour ma part, la chose est certaine, je ne choisirai plus le dernier Vargas avec l’empressement habituel. Pourvu qu’elle me pardonne !

Michelangelo 2015

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11 avril 2015 6 11 /04 /avril /2015 17:53
Le tour du doigt de Jean Anglade

Il aura fallu l’opération « Masse critique » pour que je découvre cet auteur discret et prolifique ! Jean Anglade est un écrivain auvergnat encore surnommé le Pagnol auvergnat. Après avoir lu ce roman, je comprends pourquoi…

Le tour du doigt, expression imagée, indique combien une vie même bien remplie passe à une vitesse désespérément rapide : juste le temps de faire le tour d’un doigt...

Il s’agit ici de la vie de Jules Vendange, enfant issu d’une modeste famille paysanne qui voit dans l’accès à l’Ecole normale une solution pour s’élever dans la société et éviter ainsi de devenir un mangeur de fromage, chose illégitime pour un auvergnat de pure souche, mais qu’il déteste par-dessus tout !

La grande guerre le voit partir sur le front où il perdra une jambe et nombre de ses amis. Revenu vivant sur les bancs de l’école normale, il manifestera avec ses camarades sa réprobation devant le peu de considération dont l’administration et les professeurs font preuve à l’égard de ces anciens combattants mutilés dans leur chair et dans leur âme.

Il finit par être nommé instituteur stagiaire dans une petite commune où il passera le CAP d’instituteur et fera la connaissance d’une jeune femme d’origine antillaise, Automne, veuve de guerre à laquelle il fera la cour sans relâche jusqu’à obtenir sa main…

Jules Vendange est décrit comme un homme d’une grande humanité. Son passé de mutilé de la grande guerre lui pèse, tout comme sa jambe de bois arrivée si tôt dans sa vie. Sa passion pour son métier, cet amour pour les enfants dont il a la charge, ses difficultés à trouver l’amour de sa vie, ses doutes perpétuels et ses faiblesses font de lui un personnage d’une troublante et précise consistance qui m’a fait parfois venir la larme à l’œil.

Sans pathos excessif, Jean Anglade décrit le héros avec la précision d’un roman autobiographique. Ayant été lui-même instituteur, et l’ayant été moi-même, ses descriptions d’une vie de classe et du quotidien pédagogique sont d’un réalisme parfait. Certes, l’époque permettait certaines méthodes aujourd’hui strictement interdites telles les punitions corporelles, mais l’essentiel est ailleurs, dans cette justesse de ton qui rend la lecture passionnante et chargée d’émotion. Les enfants, les parents, les collègues, les amis sont tous porteurs d’une époque révolue, dure mais joyeuse et construite sur les valeurs sûres et communes.

Il n’est pas question de nostalgie à bon compte. C’est un peu une page d’histoire que Jean Anglade a écrite, une histoire auvergnate qui va bien au-delà des frontières de l’Auvergne et restera comme un beau témoignage d’une époque dont la simplicité même participe à forger le destin d’une humanité en perpétuelle recherche de ses racines.

Je remercie vivement Babelio et les Presses de la Cité pour m’avoir permis de lire ce très beau livre et de participer modestement au centenaire d’un romancier majeur dans le paysage francophone qu’on surnomme le Patriarche des Lettres Auvergnates.

Michelangelo 2015

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3 avril 2015 5 03 /04 /avril /2015 20:05
Les méduses ont-elles sommeil ? Louisiane Clémence Dor

Une jeune femme de 18 ans quitte sa campagne où elle s’ennuie pour rejoindre la ville de lumières : Paris ! Sans travail et pratiquement sans revenus, elle est hébergée chez une amie plus âgée, Laurine, qui va lui faire découvrir le Paris By night et ses plaisirs… Les boîtes de nuit deviennent leur quotidien, mais aussi la drogue, cocaïne et autres… On assiste alors à une descente aux enfers typique sur un air de déjà-lu, d’autant qu’un petit ami s’en mêle. Tout au long du livre je me suis demandé comment on pouvait sortir presque tous les soirs à Paris, se droguer et ne pas travailler pour abonder un compte en banque qui devait être en perpétuelle souffrance…

Le sujet est banal et traité en peu de pages. Les personnages manquent de densité. Leur personnalité ne va guère au-delà du superficiel. Tout juste peut-on être ému par cette jeune femme qui se bat contre ses démons. Le contenu aurait mérité d’être étoffé.

Malgré tout, le style est vif et alerte, les dialogues souvent vraisemblables. Malheureusement, on trouve de nombreuses fautes d’orthographe et de grammaire, des contre-sens… Certaines tournures ou images présentent un comique involontaire : « Je regardais Laurine l’air béant », « Isaac est le seul type que j’ai connu capable de maigrir des os », « Isaac et moi étions le stylo et le pot à encre : mais sa minceur ne me dérangeait pas car elle était contrebalancée par le poids de son cœur » pour ne citer que ceux-là. J'espère que certaines de ces erreurs sont corrigées dans la version définitive...

Pour conclure, je dirai que ce roman n’est pas fini. On a la trame, certainement assez autobiographique. Reste à travailler le fond et la forme ! Cela permettrait de noircir les trop nombreuses pages blanches insérées entre les chapitres.

Sans rancune.

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26 mars 2015 4 26 /03 /mars /2015 11:16
Le rituel de l’ombre Eric Giacometti et Jacques Ravenne

Une course contre la montre s’engage entre le commissaire Antoine Marcas, maître maçon du Grand Orient et les adeptes d’une confrérie secrète nazie connue sous le nom de société Thulé. I s’agit de découvrir le grand mystère caché dans les archives franc-maçonniques disséminées en Europe à la fin de la seconde guerre mondiale. Ce secret pourrait bien être la clé d’accès à l’univers de l’Homme nouveau…

Le roman est avant tout un thriller bien construit. Il étaye sa substance sur des faits historiques vérifiés et fait la part belle à une incursion très détaillée dans le monde des francs-maçons. Le sang coule de façon rituelle et sans exagération. Les héros ne sont pas tout-puissants et sont particulièrement réfléchis voire posés même si l’on échappe pas à l’incontournable histoire d’amour…

Je regrette juste la présence de quelques caricatures, peut-être inévitables dans le contexte : un bourreau nazi, un tueur à gage palestinien aussi maladroit que faussement méchant… On dérape parfois dans le sensationnel façon Indiana Jones ou Da Vinci Code sans toutefois en faire le fond de recette !

Malgré tout, le roman se lit avec plaisir et je dois reconnaître qu’il m’a appris beaucoup sur ce milieu secret de la franc-maçonnerie : l’histoire de la confrérie, les symboles, les pratiques et rituels, le vocabulaire spécifique, les persécutions dont elle a fait l’objet… Une façon intelligente et agréable de s’instruire en somme !

Michelangelo 2015

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13 mars 2015 5 13 /03 /mars /2015 09:58
Ni vue ni connue de Mary Higgins Clark

Je viens de terminer le thriller de Mary Higgins Clark et mon sentiment balance entre déplaisir d’une sensation de déjà lu et plaisir malgré tout pour une œuvre bien construite et plaisante à lire. C’est le miracle de Mary Higgins Clark ! Reprendre sans fatigue les codes d’un genre un peu fatigué, le polar américain traditionnel, et le mélanger à la sauce principalement relevée aux bons sentiments. C’est agréable comme un film grand public, convenu et surtout sans réelle surprise.

Lacey, agent immobilier à Manhattan vend l’appartement de Landi, jeune actrice merveilleuse décédée accidentellement depuis un an. Mais la mère de Landi, Isabelle, reste persuadée que sa fille a été assassinée. A la suite d’un improbable imbroglio, Lacey se retrouve placée sous surveillance policière comme témoin clé du meurtre d’Isabelle dans l’appartement de Landi ! Elle disparaît dans la nature, éloignée de sa famille et de ses enfants… Mary Higgins Clark donne beaucoup dans le pathos, et ça marche assez bien, la technique étant éprouvée… Le tueur à gages qui part à la recherche de Lacey est sans pitié mais également particulièrement maladroit et c’est probablement le seul personnage qu’on ne peut prendre au sérieux ! L’histoire propose peu de rebondissements et finit bien, de toute les façons. En définitive, voilà un roman qui ne sera pas mémorable pour son lecteur mais qui permet au moins de tromper l’ennui.

Michelangelo 2015

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20 février 2015 5 20 /02 /février /2015 11:58
N'oublier jamais de Michel Bussi

Les lieux : Yport, Étretat et les communes avoisinantes, parfaitement décrites.

Les personnages : Jamel, coureur de fond handisport ; Piroz, gendarme têtu et un peu alcoolique ; Mona, petite rousse espiègle et amoureuse de Jamel dès le premier regard ; Océane, magnifique et maléfique… mais bien d’autres encore, hauts en couleurs et délicieusement croqués par la plume de Michel Bussi.

Les victimes présumées d’un tueur en série : Myrtille fiancée à Fred Saint-Michel, Morgane sœur jumelle d’Océane, Magali qu’on voit s’élancer du haut de la falaise d’Yport dès le début du roman.

Tout est en place pour développer une intrigue dont Michel Bussi va tirer les fils en établissant un calendrier des faits implacable qui va tenir le lecteur en haleine presque jusqu’à la fin du roman. Il n’y a qu’à suivre l’écharpe rouge…

Une fois de plus, Michel Bussi utilise tous les moyens pour nous mener sur de fausses pistes, pour nous montrer combien ce qui paraît évident peut rapidement devenir impossible ou juste rêvé ou imaginé. C’est sa marque de fabrique. Et c’est ce qui rend son écriture romanesque sans équivalent dans le monde du thriller à la française et que ses lecteurs, dont je fais partie, adorent.

Néanmoins, pour ajouter un bémol à ce qui pourrait paraître une critique dithyrambique, Michel Bussi pousse parfois le bouchon tellement loin que son lecteur habituel pourra penser qu’il exagère les situations.

Ce roman n’échappe pas à la règle. Les derniers chapitres ne servent qu’à rendre totalement crédibles l’ensemble, colmatant de-ci de-là tout ce qui aurait pu paraître invraisemblable. Il bétonne et en bétonnant, l’histoire perd de son charme. Je crois que Michel Bussi gagnerait à en faire peut-être un peu moins dans les tours de magie et de passe-passe. Il éviterait ainsi au lecteur de percevoir les ficelles parfois un peu grosses tirées par l’écrivain et de tomber dans l’ennui paradoxal d’avoir le sentiment d’avoir déjà lu cela dans un roman précédant… Et pourrait, en même temps, peut-être se pencher un peu plus sur le style et la psychologie des personnages qui restent assez ordinaires.

Michelangelo 2015

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14 février 2015 6 14 /02 /février /2015 17:58
Soumission de Michel Houellebecq

Nous sommes en 2022. Un professeur réputé, spécialiste de Huysmans, enseigne avec peu de conviction dans l’Université Paris III. Agé de quarante-quatre ans, il est resté célibataire et ne s’engage jamais dans ses aventures amoureuses, si ce n’est dernièrement avec Myriam, jeune et jolie étudiante juive.

Sa vie paraît toute tracée et ennuyeuse. Pourtant, l’accession au pouvoir d’une coalition musulmane modérée, d’une droite anémiée et d’un parti socialiste réduit à sa plus simple expression va bouleverser sa vie. Alors qu’il se pense athée et libre penseur, ses certitudes vont se trouver ébranlées par cette révolution qui ne dit pas son nom. Tout le problème est de savoir jusqu’où ira sa propre soumission à un monde en mutation radicale, tant spirituelle que sociale.

Contrairement à ce qu’on a voulu faire dire à Houellebecq, le propos de son roman n’est pas social, antimusulman ou réactionnaire. L’histoire contée est d’abord celle d’un homme perdu, d’autant plus perdu qu’en tant qu’intellectuel, il ne porte pas en lui la part de spiritualité qui lui permettrait d’élargir son champ de vision sur le monde. On pourrait le penser dépressif car il est solitaire et boit beaucoup. Il est simplement perdu, sans repères autres que son univers universitaire clos. La spiritualité va lui apparaître à l’occasion de cette révolution européenne qui porte l’Islam et ses préceptes au-devant de la scène, chacun se trouvant dorénavant impliqué, qu’il le souhaite ou non. Et le héros du roman n’échappe pas à cette mutation de civilisation inexorable.

Comme souvent, c’est une forme de cynisme consommé et une quête de dérision qui mène l’auteur sur les traces de son héros. On aime ou on déteste. C’est selon. Personnellement, j’apprécie les écrivains qui délivrent un message sans complaisance sur le monde.

Ce chemin sans concession est pavé de belles pages, délicieuses et magnifiquement écrites. L’érudition du personnage (de l’auteur ?) laisse le lecteur pantois et par moments émerveillé. En fermant, à regret, ce livre, je me suis dit que j’avais bien de la chance de trouver pareille lecture dans ce monde aseptisé et bien-pensant, royaume de la pensée unique !

Houellebecq n’est pas un auteur engagé, n’en déplaise à ses détracteurs mal intentionnés. C’est un homme honnête et sensible qui regarde le monde à sa façon, très désabusée et parfaitement lucide. Son roman, La carte et le territoire, avait obtenu le Goncourt. Soumission, moins consensuel, n’aura pas de prix littéraire. Mais le succès enregistré en librairie, même s’il est un peu le fruit de la polémique ambiante et de bon ton qu’on fait systématiquement à Houellebecq, montre combien les vrais lecteurs ne se trompent pas en voyant là un grand roman.

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6 février 2015 5 06 /02 /février /2015 17:32
Vieux, râleur et Suicidaire, La vie selon Ove de Frédrik Backman

Ce roman suédois ayant connu un grand succès, j’ai décidé de le lire, ne serais-ce que par curiosité !

Ove vit dans un lotissement depuis quarante ans, et à ce titre, il fait preuve d’inflexibilité et parfois de mauvaise foi pour faire respecter le règlement de copropriété. Naturellement râleur, peu bavard et très taciturne, il est craint de ses voisins et tout semble pouvoir durer indéfiniment ainsi, selon la loi d’Ove ! Mais un certain lundi, Ove alors âgé de cinquante-huit ans se retrouve brutalement au chômage. Son univers s’écroule. Que va-t-il devenir dans son quartier où il régnait en maître et traîne maintenant, désoeuvré et seul, à la recherche d’une raison d’être ?

Certes, la situation est encore bien plus complexe que cela, mais je ne puis en dire plus au risque de dévoiler certains évènements qui font la richesse de l’ambiance romanesque.

L’ouvrage est construit comme une comédie qui fait alterner émotion et humour dans un rythme enlevé. La morale de l’histoire est sans surprise, mais au moins l’auteur a-t-il pris la peine de nous distraire et nous émouvoir tout au long de l’intrigue. Je dois reconnaître que j’ai passé un bon moment de lecture !

Le style n’est pas fulgurant mais agréable à lire. Par certains côtés, ce roman ressemble un peu aux livres gavés d’humour et de bons sentiments de Legardinier (Demain j’arrête, Complètement cramé), ou encore l’excellent roman du suédois Jonas Jonasson intitulé Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire.

La lecture doit avant tout être un plaisir, et les plaisirs peuvent être légers et variés. La vie est trop courte pour se prendre au sérieux à chaque instant !

Michelangelo 2015

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